[dropcaps style=’2′]Le studio indépendant et autoproclamé « décousu » Campo Santo nous livre son premier jeu vidéo intitulé Firewatch. Vous êtes Henry, un homme dans la quarantaine qui tente d’échapper à la réalité de son couple déchiré par la maladie en acceptant un poste de garde forestier. L’introduction présentée sous forme de texte est triste à souhait et vous apprend que sa femme, Julia, est atteinte de démence. La vie n’est plus du tout teintée de rose pour Henry qui tente tant bien que mal d’affronter la dégénérescence de son amie de cœur. Une prémisse simple mais efficace pour un jeu axé sur la narration et l’aventure.
Tout au long du jeu, vous discutez avec une collègue de travail grâce à un vulgaire walkie-talkie. Delilah ou « D » pour les intimes est un personnage intéressant doté d’un caractère unique et qui tient tête à Henry grâce à des répliques mordantes. La chimie de ce duo – sans jamais qu’ils ne croisent le regard – est palpable. J’ai apprécié les différents échanges très humains, sans filtre et sans artifice. La narration est un pilier de Firewatch et les développeurs ont frappé dans le mille sur cet aspect. Intrigante, Delilah nous accompagne jusqu’à la toute fin et nous apprenons aimer à la détester. C’est notre confidente, patronne et amie dans un monde à l’écart du brouhaha quotidien des villes.[/dropcaps]
Mettre sa main au feu
Firewatch est un jeu d’aventure à la première personne qui mise énormément sur sa trame narrative et l’exploration. Henry, dans le cadre de ses fonctions de garde forestier, est amené à récupérer divers objets laissés par d’autres gardes forestiers dans des caches à cet effet. Il peut couper des arbres pour débloquer de rares raccourcis, trancher des racines à la hache ou escalader des parois rocheuses avec de la corde. Les interactions avec l’environnement sont très limitées malgré un potentiel évident. Certains objets, par exemple la lampe de poche, n’ont absolument aucune utilité dans le jeu. En voulant trop se concentrer sur son scénario, Campo Santo a oublié une règle essentielle de tout jeu vidéo : le facteur plaisir. Malheureusement, sans être sur des rails, le jeu est plutôt linéaire et ne laisse que peu de place à la créativité malgré son grand terrain de jeu.
J’ai complété Firewatch en moins de cinq heures. L’expérience immersive à laquelle je m’attendais n’était tout simplement pas à la hauteur. D’une part, l’aspect exploration est quasi inexistant. L’environnement massif est un plaisir à explorer avec sa présentation graphique soignée d’un style proche du cel-shading. Mis à part quelques notes laissées par d’autres gardes forestiers, il n’y a pas vraiment de raison de sortir des sentiers battus, en fait ce n’est pas encouragé. D’autre part, je suis de l’avis que le scénario manque de punch. Les créateurs du jeu alimentent le suspense de brillante façon avec un crescendo d’événements plus étranges les uns que les autres pour au final nous livrer une conclusion qui à mon avis était loin d’être satisfaisante.
Une forêt de problèmes
En plus d’une durée de vie très courte, d’un scénario qui s’émiette et d’une rejouabilité nulle, Firewatch est carrément frustrant sur PlayStation 4. Déjà que la pilule de 19,99 $ (17,99 $ pour les abonnés PS+) est difficile à avaler pour une expérience aussi éphémère, le jeu est techniquement un échec, du moins cette version. Les textures (arbres, herbes, feuilles, etc.) se chargent à mesure d’avancer et brisent l’immersion. La fréquence d’images n’est jamais fluide : si Henry court, l’image devient souvent saccadée, ce qui est carrément inacceptable. Sans compter que malgré le peu d’heures jouées, j’ai eu droit à un crash et à un bogue majeur où Henry a sauté et s’est retrouvé hors du jeu, ce qui a nécessité un chargement de sauvegarde antérieure. Je comprends qu’un jeu indépendant n’a pas les moyens d’un grand studio, mais autant de problèmes techniques couplés à une expérience pour le moins décevante m’ont laissé un goût amer en bouche.
Seul au monde
La plus grande qualité de Firewatch est de nous questionner par rapport à notre propre solitude dans des moments d’adversité. Malgré la faible note que je lui attribue, ce jeu n’est pas dénudé d’intérêt : à titre expérimental, c’est réussi. Toutefois, j’estime que ce premier projet de Campo Santo n’est pas assez accrocheur. C’est dommage car l’engin graphique est capable de produire des paysages à couper le souffle et, sur papier, le concept est excellent. L’exécution manque de finesse et les développeurs ont trop concentré d’efforts sur la narration au détriment des autres facteurs. L’exploration en particulier a été ratée, je crois que l’utilisation de l’appareil photo avait un fort potentiel encore une fois laissé de côté. Firewatch est en quelque sorte le reflet d’attentes irréalistes et peut-être même un coup de génie en ce sens que le jeu nous prépare à de grandes choses sans jamais les réaliser. L’ultime excitation pour la banalité de notre propre existence parsemée d’hyperbole, d’attentes folles à des scénarios pourtant habituels, laissant ainsi notre imaginaire guider notre raison.
Points positifs[list style=”check”] [list_item]Dialogues vivants et bien écrits[/list_item] [list_item]Style visuel accrocheur[/list_item] [/list] | Points négatifs[list style=”mark”] [list_item]Durée de vie[/list_item] [list_item]Pas très amusant[/list_item] [list_item]Le scénario tombe à plat[/list_item] [list_item]Nombreux problèmes techniques[/list_item] [/list] |
depuis hier le 11 avril le studio Campo Santo, a sorti une mise à jour langue Français, l’Allemand, le Russe, le Chinois et (l’Espagnols sous-titres)